Maurizio Pollini (Deut./Engl./Franz.)
Maurizio Pollini à propos de son nouvel enregistrement Chopin
Maurizio Pollini, vous remportiez en 1960 le Concours Chopin de Varsovie. Depuis, vous jouez souvent ses œuvres en récital, et maintenant, une fois encore, vous faites paraître un nouvel enregistrement Chopin. Quelle impression cela fait-il de partager votre vie avec un compositeur? Votre ami Chopin a-t-il changé au fil du temps?
Au départ, après le Concours Chopin, je ne voulais pas devenir un pianiste spécialiste de Chopin. Je m’intéressais plus particulièrement au répertoire allemand - Mozart, Beethoven, Schubert, Schumann et Brahms - et je me suis concentré dans un premier temps sur ces compositeurs. Bien sûr, Chopin a toujours eu sa place, mais je voulais que mon répertoire représente un échantillon de toute la grande musique. Par chance, celle-ci est bien trop vaste pour que quiconque puisse jamais tout jouer. Je voulais à l’origine consacrer mon temps à différentes réalités, et Chopin n’était que l’une d’elles.
Vous n’aviez que dix-huit ans à l’époque, et vous avez surpris le monde musical en vous retirant de la scène publique.
Cela ne s’est pas vraiment passé ainsi. Mais on m’a aussitôt demandé de donner un concert après l’autre, et je ne pensais pas que c’était une bonne chose. Je trouvais qu’il était trop tôt pour commencer une carrière internationale directement. Alors, pendant un an et demi je n’ai pas donné de concerts, et puis j’ai recommencé progressivement à me produire en public. J’ai utilisé ce temps pour bâtir mon répertoire et me consacrer aussi aux compositeurs du XXe siècle - à commencer par Schoenberg, Webern, Boulez, Stockhausen et Nono. Aujourd’hui encore, j’ai grand plaisir à jouer la Deuxième Sonate de Boulez, car elle a un nombre incroyable de niveaux qui ne se révèlent pas nécessairement aussitôt. C’est une œuvre qui ne cesse d’être un défi pour être mieux jouée la fois suivante. Pour moi, il en va de même pour Chopin. Il est resté un constant compagnon - et je crois vraiment qu’il est l’un des plus grands compositeurs. On ne peut se rapprocher de lui qu’en travaillant de plus en plus sa musique.
Ai-je raison d’avoir l’impression que vos interprétations deviennent de plus en plus compactes, plus comprimées, que vous vous dispensez du geste pour vous rapprocher encore plus du noyau de l’expression?
C’est possible, si c’est ce que vous entendez. Personnellement, je pense que je joue Chopin plus librement que je ne le faisais dans ma jeunesse, ou au moment du Concours Chopin. Je me permets un peu plus de rubato, un peu plus de liberté. J’aime toujours mes vieux enregistrements, mais certains d’entre eux me paraissent aujourd’hui un peu raides. Mon premier modèle était Arthur Rubinstein, qui jouait Chopin de manière très moderne pour son époque. Il a prouvé que la qualité du rubato est plus importante que la quantité. Il a introduit une simplicité qui permet à la grandeur de la musique de s’affirmer de manière peut-être encore plus saisissante.
Comment se fait-il que dans vos quêtes vous croisiez constamment Chopin?
Il est étonnant que Chopin ait composé presque exclusivement des chefs-d’œuvre. Comme vous le savez, il était très strict avec lui-même et avec ses œuvres, et il n’approuva jamais la publication de certaines des mazurkas et des valses que nous jouons aujourd’hui. Les œuvres qu’il autorisa à paraître (et certaines qu’il n’autorisa pas) sont en effet des chefs-d’œuvre. Il y a une bonne raison pour laquelle chacune de ses œuvres est jouée en concert de nos jours. Dans le même temps, il n’est pas juste que de grandes œuvres d’autres compositeurs soient si négligées - une grande partie de la musique pour piano de Schumann, par exemple, est trop rarement jouée en concert.
Le succès de Chopin n’est-il pas fondé sur un malentendu? Tout élève pianiste joue Chopin, et on l’aime surtout en raison de son caractère populaire et de son pathos romantique . . .
Il a écrit une musique d’une profondeur si incroyable qu’on ne peut la saisir immédiatement. Il est vrai que ses œuvres admettent de nombreuses interprétations différentes et que dans le passé nous avons entendu de nombreuses démarches différentes. Vladimir Horowitz interprétait généralement Chopin de manière très romantique, très libre. J’ai un jour eu l’honneur de l’entendre jouer une mazurka chez lui. Ce fut un moment incroyable, au cours duquel il a créé à la perfection le climat de mélancolie slave. Chopin était un homme extrêmement critique, qui travaillait pendant très longtemps sur chaque composition, et examinait de près chaque note et chaque accord. Ainsi, à la fin de la Deuxième Ballade, il y a trois accords identiques - et de ces trois accords il y a quatre versions: deux dans le manuscrit, une dans l’édition allemande et une dans la française. Chopin travaillait les moindres détails. Il n’écrivit pratiquement pas une seule note superflue, et son discours est toujours hautement concentré. C’est pour moi la source de l’immense impression de perfection que ses œuvres produisent encore en concert.
Ce sont précisément ces profondeurs logiques qui semblent souvent étouffées par la simple excitation que suscite l’aspect émotionnel de ses compositions.
L’aspect émotionnel est manifestement le plus important, et j’y ai toujours consacré toutes mes forces - mais il reste difficile à expliquer en mots. Ce qui pourrait aider à mieux comprendre son génie est une analyse de sa mélodie et de son harmonie. Son manuscrit a été modifié dans certaines éditions. Il a écrit un mi bémol qui, dans la version imprimée, devient un ré dièse - lequel convient mieux à l’idée conventionnelle des règles harmoniques. Bien sûr, ces deux notes sont représentées par la même touche sur le piano, mais Chopin savait exactement pourquoi il avait écrit un mi bémol.
Peut-on vraiment rendre clairement de tels détails dans une interprétation?
Bien sûr, on espère pouvoir le faire. Un violon peut en fait distinguer les deux notes avec une sonorité différente. Dans le nouvel enregistrement, j’essaie également de corriger certains détails. Dans la Deuxième Sonate, les premières mesures du Grave sont généralement omises dans la reprise de l’exposition - mais j’ai appris d’une analyse des sources qu’il est probablement authentique de les inclure.
Alors qu’on fait souvent ressortir l’émotion dans Chopin, dans vos interprétations on remarque nettement que la tension entre le «mot» et le sentiment est toujours en jeu, entre la construction rigoureuse et la turbulence émotionnelle.
Chopin disait qu’il ne tolérait pas une musique qui ne soit pas sous-tendue par une pensée. Je trouve extraordinaire, aussi, la variété des caractères déployée par le compositeur. Dans l’enregistrement, je joue des œuvres de la même période: mazurkas, valses, la grande Deuxième Sonate, le Deuxième Impromptu et la Ballade op. 38. Toutes ces œuvres témoignent de la variété de Chopin.
La Sonate en si bémol mineur apparaissant certainement comme le grand chef-d’œuvre . . .
C’est l’une de ses plus grandes œuvres! Et je trouve intéressant que Schumann, qui était pourtant un grand admirateur du génie de Chopin, ait affirmé que le finale n’était même pas de la musique. Je suis ravi de prendre cette opinion comme point de départ - notamment pour voir combien la musique de Chopin était et est encore incroyablement moderne dans cette conclusion énigmatique et révolutionnaire de la sonate. Schumann disait aussi qu’un Adagio en majeur aurait été plus convaincant que la Marche funèbre: mais la grandeur de la Sonate tient à son unité tragique. Chopin fut critiqué pour la forme sonate du premier mouvement, qui ne respecte pas strictement les principes classiques - il n’écrit pas de reprise conventionnelle, mais compose une section dans laquelle les deux thèmes principaux sont réunis. Je crois que sa grandeur véritable tient précisément à son courage de rompre avec la forme sonate académique.
Est-il vrai que vous entendez parfois de la musique dans votre tête de la même manière que d’autres écoutent leur iPod?
Écouter cette forme de musique est parfois une plus belle expérience qu’un concert.
Vous êtes un joueur d’échecs passionné. Là aussi, il faut penser la partie avant de jouer. Écouter mentalement une partition est-il un processus similaire?
La pensée musicale est un processus très émotionnel. Et je crois qu’il est important pour un musicien de laisser naître l’œuvre dans sa tête. À l’instrument, on cherche en fin de compte la sonorité pour exprimer ce qu’on a conçu intérieurement. Il est important néanmoins de s’asseoir au piano avec une conception complètement formée, car on est libre lorsqu’on réfléchit seulement sans jouer.
Est-il possible de concevoir quelque chose qui ne fonctionne pas ensuite à l’instrument?
À l’instrument, tout peut arriver.
Pollini about Chopin
Maestro Pollini, in 1960 you won the Chopin Competition in Warsaw. You play his works frequently in recitals and now, once again, you’re releasing a new Chopin recording. What’s it like sharing your life with a composer? Has your friend Chopin changed at all over the course of time?
At first, after the Chopin Competition I didn’t want to become a Chopin pianist. I was particularly interested in the German repertoire - Mozart, Beethoven, Schubert, Schumann and Brahms - and initially I concentrated on these composers. Of course, Chopin has always played his part, but I wanted my repertoire to represent a cross-section of great music. Luckily, there’s far more of that than anyone could ever play. I wanted at first to devote my time to different musical realities, among which Chopin was only one.
You were only 18 at the time, and you shocked the world by initially withdrawing from the concert scene.
Well, that wasn’t quite what happened. But I was immediately asked to play one concert after another, and I didn’t think that was right. I thought it was too soon for me to begin an international career straight away. And so for a year and a half I didn’t give any concerts, and then I gradually began appearing in public again. I used that time to build up my repertoire and started to dedicate my time to 20th-century composers as well - beginning with Schoenberg, Webern, Boulez, Stockhausen and Nono. To this day I still greatly enjoy playing Boulez’s Second Sonata because it has so incredibly many levels which don’t necessarily reveal themselves at once. It’s a work that never stops being a challenge to perform better the next time. For me, Chopin is also like that. He’s remained a steady companion - and I sincerely believe that he’s one of the greatest composers. One can only get closer to him by working more and more at his music.
Am I correct in my impression that your interpretations are becoming increasingly compact, more compressed, that you dispense with the gesture in order to get ever closer to the core of the actual expressive statement?
It is possible, if that’s how you hear it. Personally, I think I play Chopin more freely than I did it in my youth, or at the time of the Chopin Competition. I allow myself somewhat more rubato, somewhat more freedom. I still like my old recordings, but some of them strike me today as rather straight. My first model was Arthur Rubinstein, who played Chopin in a very modern way for his time. He proved that the quality of the rubato is more important than the quantity. He introduced a simplicity that allows the greatness of the music perhaps to come across even more strikingly.
How is it that in your quests you’re always bumping into Chopin?
It’s astounding that Chopin composed almost exclusively masterpieces. As you know, he was very strict with himself and his works, and never approved for publication some of the mazurkas and waltzes that we play today. The works he did authorize (and also some that he didn’t) are indeed masterpieces. There’s a good reason why every single one of his pieces is performed in concert nowadays. At the same time, it’s unfair that great works by other composers are so neglected - a great part of Schumann’s piano music, for example, is played too seldom on the concert platform.
Isn’t Chopin’s success based on a misunderstanding? Every piano student plays Chopin, and he’s mainly loved on account of his popular character and romantic pathos?
He wrote such unbelievably profound music that you can’t grasp it immediately. It surely is true that his works admit many different interpretations and that in the past we’ve heard many different approaches. Vladimir Horowitz generally interpreted Chopin very romantically, very freely. I once had the honour of hearing him play a mazurka at his home. That was an incredible moment, in which he generated the mood of Slavic melancholy to perfection. Chopin was a highly critical person, who worked for a very long time on every single composition, and closely examined every note and every chord. For example, at the end of the Second Ballade there are three identical chords - and of these three chords there are four versions: two in the manuscript, one in the German edition and one in the French. Chopin worked in minute detail. He virtually wrote not a single superfluous note, and his statements are always highly concentrated. This for me is the source of the enormous power of perfection that his works still produce in the concert hall.
It is precisely these logical depths that often seem to be suppressed in the sheer excitement over the emotional aspect of his compositions.
The emotional aspect is obviously the most important thing, to which I have always dedicated all my strengths - but it is difficult to explain this in words. What might help to understand better his genius could be an analysis of his melody and his harmony. His manuscript has been altered in some editions. He writes an E flat which, however, in the printed version becomes a D sharp - because it better fits a conventional idea of the harmonic rule. Of course both notes are represented by the same key on the piano, but Chopin knew exactly why he wrote an E flat.
Can one actually make such details clear in a performance?
One hopes to, of course. A violinist can actually distinguish the two notes with a different sound. In the new recording I try also to correct some details. In the Second Sonata, the first bars of the Grave are usually omitted in the repeat of the exposition - but I’ve learned from an analysis of the sources that including them is most probably authentic.
Whereas Chopin often is made to sound very emotional, in your Chopin playing it’s especially noticeable that the tension between the “word” and the feeling is always in play, between strict construction and emotional turbulence.
Chopin said that he didn’t tolerate music that had no thinking behind it. I also find the composer’s variety of characters extraordinary. On the recording I play works from the same period: mazurkas, waltzes, the great Second Sonata, the Second Impromptu and the Ballade op. 38. All these works display Chopin’s variety.
With the B flat minor Sonata surely standing out as the great masterpiece . . .
It’s one of his greatest works! And I find it interesting that, of all people, Schumann, who was such a great admirer of Chopin’s genius, asserted that the finale was not even music. I’m happy to take that opinion as a point of departure - not least, in order to see how incredibly modern Chopin’s music is and was in this enigmatic and revolutionary conclusion of the sonata. Schumann also said that an Adagio in major would have been more convincing than the Marche funèbre: but the greatness of the Sonata lies in its tragic unity. Chopin was attacked for the sonata form of the first movement because he didn’t strictly follow classical principles - he didn’t write a conventional repeat but instead composed a section in which both main themes come together. I believe, that his real greatness lies precisely in this courage to break with academic sonata form.
Is it true that you sometimes hear music in your head the way other people listen to their iPod?
Listening to this form of music can sometimes be more beautiful than a concert.
You’re a passionate chess player. There, too, one has to think a game through before playing. Is listening to a score in your head a similar process?
Musical thought is a very emotional process. And I think it’s important for a musician to allow the piece to originate in his or her head. At the instrument you’re ultimately seeking the sound with which to express what you’ve conceived internally. It’s important, however, to sit down at the piano with a fully formed conception because you’re freer when you’re only thinking and not playing.
Is it possible to think something up which then doesn’t function on the instrument?
On the instrument itself anything can happen.
Pollini über Chopin
Maestro Pollini, 1960 haben Sie den Chopin-Wettbewerb in Warschau gewonnen, Sie spielen Werke Chopins immer wieder auf Konzerten und veröffentlichen nun erneut eine Chopin-Aufnahme. Wie ist es, das eigene Leben mit einem Komponisten zu teilen? Hat sich Ihr Freund Chopin im Laufe der Zeit verändert?
Zunächst war es ja so, dass ich nach dem Chopin-Wettbewerb nicht unbedingt ein Chopin-Pianist werden wollte. Mich interessierte besonders das deutsche Repertoire, Mozart, Beethoven, Schubert, Schumann und Brahms. Also habe ich mich erst einmal mit diesen Komponisten beschäftigt. Natürlich spielte Chopin dabei eine Rolle, aber ich wollte, dass mein Repertoire einen Querschnitt der großen Musik bietet. Davon gibt es zum Glück mehr, als man je spielen kann. Ich wollte meine Zeit zunächst unterschiedlichen musikalischen Wirklichkeiten widmen, unter denen Chopin nur eine war.
Damals waren Sie 18 Jahre alt und schockierten die Welt, indem Sie sich erst einmal zurückgezogen haben.
Na, so war es nun auch nicht. Ich wurde umgehend eingeladen, ein Konzert nach dem anderen zu spielen. Aber ich hielt es für zu früh, sofort eine internationale Karriere zu beginnen. Also habe ich anderthalb Jahre keine Konzerte gegeben und bin erst nach und nach wieder aufgetreten. Die Zeit habe ich genutzt, um mein Repertoire aufzubauen, außerdem habe ich begonnen, mich den Komponisten des 20. Jahrhunderts zu widmen. Zu Beginn Schönberg, Webern, Boulez, Stockhausen und Nono. Boulez’ zweite Sonate spiele ich bis heute sehr gern, weil sie so unglaublich viele Ebenen hat, die sich einem nicht gleich erschließen. Das Werk lässt sich immer noch besser spielen. Und so geht es mir auch mit Chopin. Er ist ein ständiger Wegbegleiter geblieben - und ich glaube tatsächlich, dass er einer der größten Komponisten ist. Man kann ihm nur näher kommen, je mehr man an ihm arbeitet und sich mit ihm auseinander setzt.
Stimmt mein Eindruck, dass Ihre Interpretationen immer kompakter werden, sich immer mehr verdichten, dass Sie auf den Gestus verzichten und so tiefer zum Kern der eigentlichen Aussage vordringen?
Möglich. Wenn Sie das so hören. Ich persönlich glaube, dass ich Chopin freier spiele als in meiner Jugend, oder zur Zeit des Chopin-Wettbewerbs. Ich erlaube mir etwas mehr Rubato, etwas mehr Freiheit. Ich mag meine alten Aufnahmen, aber einige kommen mir heute etwas zu geradlinig vor. Mein erstes Vorbild war ja Arthur Rubinstein, der Chopin in einer für seine Zeit sehr modernen Art gespielt hat. Er hat bewiesen, dass die Qualität des Rubatos wichtiger ist als die Quantität. Er hat eine Einfachheit eingeführt, in der die Großartigkeit der Musik vielleicht eindringlicher wahrnehmbar ist.
Aber wie kommt es, dass Sie in Ihrer Suche immer wieder auf Chopin stoßen?
Es ist doch verblüffend, dass Chopin fast nur Meisterwerke komponiert hat. Wie Sie wissen, war er sehr streng mit sich selbst und seinen Werken, hat einige Mazurken und Walzer, die wir heute spielen, gar nicht zur Veröffentlichung freigegeben. Und die Werke, die er autorisiert hat (und auch einige, die er nicht autorisiert hat), sind tatsächlich Meisterwerke. Jedes einzelne seiner Stücke wird heute zu Recht in Konzerten aufgeführt. Gleichzeitig ist es ungerecht, dass bedeutende Werke anderer Komponisten derart vernachlässigt werden - zum Beispiel Schumanns Klavierwerk, das in großen Teilen auf den Konzertpodien zu selten gespielt wird.
Liegt dem Erfolg Chopins nicht ein Missverständnis zugrunde? Jeder Klavierschüler spielt Chopin, und meist wird er aufgrund seines Volkscharakters und des romantischen Pathos geliebt.
Er hat so bemerkenswert tiefe Musik geschrieben, die sich an der Oberfläche nicht fassen lässt. Wahr ist sicherlich auch, dass seine Werke viele unterschiedliche Interpretationen zulassen. Und in der Vergangenheit haben wir auch viele verschiedene Herangehensweisen gehört. So hat Vladimir Horowitz Chopin meist sehr romantisch interpretiert, sehr frei. Ich hatte einmal die Ehre, ihn bei sich zu Hause mit einer Mazurka zu hören. Das war ein unglaublicher Augenblick, in dem er perfekt slawische Melancholie heraufbeschworen hat. Chopin war ja ein äußerst kritischer Mensch, der an jeder einzelnen Komposition sehr lange gearbeitet hat und jede Note, jeden Akkord, unter die Lupe nahm. Zum Beispiel gibt es am Ende der zweiten Ballade drei gleiche Akkorde - und von diesen drei Akkorden gibt es vier Versionen: zwei im Manuskript, eine in der deutschen Edition, eine in der französischen. Chopin hat punktgenau gearbeitet. Er hat so gut wie keine überflüssige Note geschrieben und ist immer sehr konzentriert in seiner Aussage. So entsteht für mich die ungeheure Kraft der Perfektion, die seine Werke bis heute im Konzertsaal ausmacht.
Gerade diese logische Tiefe scheint oft von der puren Begeisterung für den emotionalen Aspekt seiner Kompositionen verdrängt zu werden.
Der emotionale Aspekt ist natürlich der wichtigste, und ich habe all meine Kraft darauf verwandt, aber das lässt sich schwer in Worte fassen. Um Chopins Genialität zu begreifen, sollte man die Melodie und Harmonie seiner Musik analysieren. Sein Manuskript wurde in einigen Editionen verändert. Da schreibt Chopin ein »Es«, das aber in der gedruckten Fassung zum »Dis« wird - weil es der konventionellen Idee von den Regeln der Harmonie besser entspricht. Natürlich werden beide Noten durch die gleiche Taste auf dem Klavier dargestellt, aber Chopin wusste auch genau, warum er ein »Es« geschrieben hat.
Kann man derartige Feinheiten eigentlich in einer Aufführung deutlich machen?
Das hofft man natürlich. Ein Geiger könnte die beiden Noten sogar tatsächlich durch einen anderen Klang abbilden. In der neuen Einspielung versuche ich, einige Details zu korrigieren. In der zweiten Sonate wird die Wiederholung der Exposition gewöhnlich ohne die ersten Takte des Grave gespielt - ich habe aber bei der Quellenanalyse herausgefunden, dass es wahrscheinlich authentisch ist, die Takte einzufügen.
Häufig klingt Chopin sehr pathetisch. Bei Ihrem Chopin-Spiel fällt mir auf, dass es stets um das Spannungsfeld zwischen Verstand und Gefühl zu gehen scheint, zwischen strengem Aufbau und emotionaler Ergriffenheit.
Chopin sagte, dass er Musik ohne Gedanken dahinter nicht akzeptieren kann. Bemerkenswert finde ich auch Chopins Vielfältigkeit der Charaktere. In der Aufnahme spiele ich Werke aus einer Schaffensperiode: Mazurken, Walzer, die große zweite Sonate, das zweite Impromptu und die Ballade Opus 38. All diese Werke zeigen die Vielfältigkeit Chopins.
Wobei die b-moll-Sonate sicherlich als großes Meisterwerk auffällt . . .
Sie ist eines seiner größten Werke! Und ich finde es interessant, dass ausgerechnet Schumann, der Chopins Genie bewunderte, über das Finale sagte, dass es keine Musik mehr sei. Ich nehme diese Behauptung gern als Ausgangsposition. Auch, um zu sehen, wie unglaublich modern Chopins Musik in diesem enigmatischen und revolutionären Ende der Sonate ist und war. Schumann hat ebenfalls gesagt, dass ein Adagio in Dur überzeugender gewesen wäre als der Marche funèbre: Aber die Größe der Sonate liegt in ihrer tragischen Einheit. Chopin wurde wegen der Sonatenform im ersten Satz angegriffen, weil er der klassischen Form nicht streng folgte, keine konventionelle Wiederholung ansetzte, sondern einen Abschnitt komponierte, in dem die beiden Hauptthemen zusammenkommen. Ich glaube, genau in diesem Mut, die akademische Sonatenform aufzulösen, liegt seine eigentliche Größe.
Stimmt es, dass Sie manchmal Musik in Ihrem Kopf hören, so wie andere Menschen mit einem iPod?
Diese Form Musik zu hören kann manchmal schöner sein als ein Konzert.
Sie sind ein passionierter Schachspieler - beim Schach muss man Partien durchdenken, bevor man sie spielt. Ist Ihr stilles Hören der Partituren im Kopf ein ähnlicher Prozess?
Musikalisches Denken ist ein sehr emotionaler Prozess. Und ich glaube, dass es wichtig für einen Musiker ist, das Stück in seinem Kopf entstehen zu lassen. Am Instrument sucht man letztlich nur den Klang, um das Gedachte auszudrücken. Es ist aber wichtig, sich mit einem fertigen Gedanken ans Klavier zu setzen. Man ist freier, wenn man nur denkt und nicht spielt.
Kann es sein, dass man sich etwas ausgedacht hat, was am Instrument dann nicht funktioniert?
Am Instrument selbst kann alles passieren.